Depuis le temps qu’on crève, de faim, de froid, de tout,
Autant faire la grève ! Autant crever debout !
Dans la splendeur florale du tiède mois de mai,
La grève générale commence pour de vrai.
Torrent près de la source, et fleuve un peu plus bas,
La grève dans sa course grossit à chaque pas.
Partis à quelques hommes, sans armes, en haillons,
Voyez amis, nous sommes déjà des millions.
Marchons à la bataille,
Fronts hauts et poings serrés,
La terre au loin tressaille,
Sous nos souliers ferrés !
Que veulent nos cohortes de libres travailleurs ?
Frayer de leurs mains fortes la route aux temps meilleurs.
L’armée attend en ligne, mur aux créneaux d’acier.
Les chefs ont pour consigne : ne faire aucun quartier.
Voici l’instant sublime : Ouvrez vos rangs, soldats !
On vous commande un crime, nous vous tendons les bras !
Victoire, au lieu de mordre le peuple en pleine chair,
Sourds aux bourreaux de l’ordre, ils ont mis crosse en l’air !
Devant nous, plus d’obstacle : l’armée a fait son choix,
Elle aide à la débâcle du vieil ordre bourgeois.
Pour faire la conquête d’un monde radieux,
Plus rien ne nous arrête soyons nos propres dieux !
Jacques Turbin